Moolman Pasio : « Le Tour a été ma première inspiration »

Septuple championne continentale, Ashleigh Moolman Pasio se prépare pour le plus grand défi de sa carrière, celui qui peut concrétiser ses rêves de maillot jaune à l’occasion du premier Tour de France Femmes avec Zwift. À la tête du Team SD Worx, la star sud-africaine dispute sa dernière saison et veut en profiter pour inspirer les prochaines générations de femmes comme elle l’a été elle-même en regardant le Tour masculin. Elle se lancera ensuite dans de nouveaux projets dans le monde virtuel du cyclisme avec le collectif Rocacorba.

Pour votre dernière saison, vous disputez le premier Tour de France Femmes avec Zwift. En quoi cet événement est-il spécial pour vous ?

Je me suis lancée dans le cyclisme tardivement, après des blessures, alors que j'étudiais à l'université. Pendant les vacances de juillet, je m’installais dans le canapé et je regardais le Tour de France pendant trois semaines, avec les hommes qui affrontaient ces belles ascensions en France. Ça a vraiment été ma première inspiration pour devenir cycliste professionnelle. Ça montre l'importance du Tour de France. C'est la seule course de cyclisme sur route que tout le monde connaît, que tout le monde a regardée d’une façon ou d’une autre. Donc, quand je suis devenue cycliste professionnelle, c'était la première question que les gens me posaient toujours : ‘’Tu fais le Tour de France ?’’. Maintenant, après 12 ans dans le peloton, je peux dire oui ! Enfin, le peloton féminin bénéficie de la portée du Tour de France. Et on a eu un avant-goût pendant la pandémie, quand on a fait le Tour de France virtuel sur Zwift en 2020. J'ai gagné l'étape reine sur le Mont Ventoux virtuel et le lendemain, je me suis arrêtée dans un café à Gérone et mon mari m'a dit : ‘’Tu remarques qu'ils te pointent du doigt ?’’. Je n'ai pas l'habitude ! Et c'était parce qu'ils avaient regardé le Tour de France virtuel.  

Y a-t-il des coureurs qui vous ont particulièrement inspiré en regardant le Tour ?

Alberto Contador. Il se démarquait par son style, et j’imagine que j’ai un style assez similaire. C'était un grimpeur explosif, il accélérait, puis ralentissait, puis accélérait, en changeant tout le temps de rythme, souvent en danseuse. C'est vraiment un coureur auquel je pouvais m'identifier.

À peu près à la même époque, des coureurs comme Robbie Hunter puis Daryl Impey ont marqué l'histoire du cyclisme africain...

Robbie Hunter a vraiment été le premier que j'ai pu admirer. Daryl a plutôt mon âge. Il a commencé à avoir du succès sur le Tour de France quand j'étais professionnelle. Robbie Hunter était plus une inspiration avec sa victoire d’étape sur le Tour de France, toujours présent dans les sprints, alors que je rêvais de devenir pro. Et puis bien sûr, avec Daryl, alors que j'étais déjà pro à ses côtés, c'était formidable de voir l'Afrique, et l'Afrique du Sud, aussi performantes sur la scène mondiale et sur le Tour de France, avec le Maillot Jaune. C'était vraiment inspirant.  

C’est à votre tour d’inspirer les Africains...

C'est vraiment vraiment très spécial. En fait, c’est une grande responsabilité d'être une ambassadrice pour un continent comme l'Afrique. C'est un très grand continent ! J'ai beaucoup d’échanges avec des femmes africaines, en particulier d'Éthiopie, d'Érythrée, du Rwanda aussi. Elles m'envoient des messages pour me demander : ‘’Comment devenir athlète professionnelle comme toi ?’’. C'est tout un défi car il y a de nombreux obstacles sur leur chemin, des barrières culturelles dans leurs pays et des problèmes de visa. La confiance est également l'un des plus grands obstacles pour une femme. Alors j'essaie de travailler un peu sur ces problèmes, pas à pas, et en ce moment je mène des actions avec le collectif Rocacorba, une communauté virtuelle qui a commencé pendant la pandémie de Covid, quand j'ai découvert le potentiel du monde virtuel pour connecter des personnes du monde entier. On organise des sessions pour partager notre expérience et, espérons-le, nous inspirer et nous motiver. J'ai également l'intention d'ouvrir des centres d'entraînement en salle Zwift dans des conteneurs, pour rendre le cyclisme accessible non seulement aux jeunes filles mais aussi aux femmes qui souhaitent gagner en autonomie grâce au cyclisme. J’espère ouvrir le premier centre d'ici la fin de l'année à Khayelitsha, un township du Cap. Tout cela me donne de la motivation et des raisons de souffrir sur la Super Planche des Belles Filles le 31 juillet !  

Quelles sont vos ambitions sur le Tour de France Femmes avec Zwift ?

Bien sûr, j'adorerais gagner le Maillot Jaune. Je sais que c’est une mission difficile et je serais contente avec un podium et une victoire d'étape. Je fais de mon mieux pour me préparer et être dans ma meilleure forme possible pour me battre pour le Maillot Jaune. Avec un parcours équilibré sur huit jours, il va falloir être prête à faire la différence à tout moment, tout en gardant la Super Planche des Belles Filles à l’esprit. Il était très important pour moi de faire une reconnaissance de la 4e étape, en Champagne, à travers les chemins de vigne. C'est vraiment très beau ! Et les cailloux sont plus tranchants que ce qu’on connaît sur les Strade Bianche, c’est une bonne chose de l’avoir vue. Je pense que le Maillot Jaune peut changer plusieurs fois et tout se décidera dans les montagnes le dernier week-end.